jeudi 21 août 2008

Anye, anye, tolalito…

« N.D.C.D.P.- Une réflexion juste d'un témoin lucide. Nous détachons deux phrases du texte qui le résument bien, à notre avis.

« Ce que la nation haïtienne est en train de payer aujourd’hui, ce ne sont pas les flottements d’un texte imparfait, mais ses choix de votants, et son incapacité à forcer les politiques haïtiens et la communauté internationale à avoir ses intérêts pour priorités.»

«...Et avec ce même texte, d’autres auraient peut-être fait une autre histoire. »


Anye, anye, tolalito…

Par Lyonel Trouillot
Le Matin, 21 août 2008

A chacun ses priorités.
Qui justifient le tolalito.
Certains ministres ne veulent pas partir, s’activent, se démènent.Certaines personnes veulent absolument qu’ils partent (il y a des places à prendre) et s’activent, se démènent.
Des formations politiques veulent des postes et s’activent, se démènent.
Des parlementaires (quand ils n’érigent pas des édifices au-dessus de la voie publique) veulent pouvoir et influence, menacent, exigent, marchandent.
Quant au président Préval (on comprend mieux son silence durant la campagne électorale) il semble s’être trouvé à la fois un ennemi et une mission : accuser la Constitution et trouver des raisons d’y toucher. Avec des complices dans « la communauté internationale ».
La Constitution n’a pourtant pas voté des parlementaires belliqueux et plus intéressés à défendre des intérêts de clan ou privés que ceux de leurs mandants. Cela ne s’applique certainement pas à tous les parlementaires, mais la nation a-t-elle le temps de sortir le bon grain de l’ivraie ?
La Constitution n’a pas non plus nommé les membres d’un Exécutif qu’une majorité de citoyens a jugé inefficace.
La Constitution n’a pas non plus élu le président Préval. Des gens l’ont élu. Et ils ne l’avaient pas élu pour qu’il cherche dans un texte un bouc émissaire. Ils l’avaient élu dans les termes de la Constitution pour qu’il dirige un pays. Pour des services de l’Etat plus efficaces. Pour un peu plus de nourriture sur les tables, le droit de vivre en paix, et l’atténuation des clivages sociaux. C’est dans les termes prévus par la Constitution qu’il a prêté serment, qu’il s’est fait photographier avec l’écharpe présidentielle… La Constitution était bonne pour se faire élire mais elle ne serait pas bonne pour diriger.
Dans cet odieux totalito entre exécutif et parlement, la Constitution n’est qu’un malheureux instrument que les uns et les autres utilisent pour ne pas faire ce pour quoi la nation les paye. Et fou celui qui voudrait la modifier au profit des uns contre les autres. Et les uns comme les autres trouveraient dans n’importe quel texte matière à alimenter laxisme, mauvaise foi et désir de puissance. Et avec ce même texte, d’autres auraient peut-être fait une autre histoire.
Ce que la nation haïtienne est en train de payer aujourd’hui, ce ne sont pas les flottements d’un texte imparfait, mais ses choix de votants, et son incapacité à forcer les politiques haïtiens et la communauté internationale à avoir ses intérêts pour priorités.
Il viendra sans doute le temps de toucher à ce texte imparfait. Mais le texte qui sortira de la réforme ne sera pas parfait. Et le temps d’une nouvelle imperfection n’est pas venu.
Ce tolalito sans fin entre des dirigeants s’étant trompés de priorités n’habilite aucune instance politique à se cacher derrière la Constitution.
La nation n’est pas convaincue que le président Préval fait tout ce qu’il devrait faire pour la servir. Elle n’est pas convaincue que le parlement fait tout ce qu’il devrait faire pour la servir. Elle n’est pas convaincue que les formations politiques font tout ce qu’elles devraient faire pour la servir. Mais elle est convaincue de leur expertise en matière de tolalito. Dans un tel contexte, celui qui s’acharnerait à chercher dans un texte la cause de son échec ne passerait que pour le plus coquin d’une bande de coquins. Ce n’est pas la voie à suivre pour qui voudrait prétendre à une vieillesse paisible.
Avant de chercher des boucs émissaires dans la chose écrite, les uns et les autres (exécutif, parlement, communauté internationale) ils devraient essayer de convaincre la nation haïtienne de leur bonne foi.
Mais à force de totalito, de luttes pour le pouvoir, ils ont perdu cette capacité. Et si l’on ne peut convaincre de sa bonne foi, comment pourrait-on espérer convaincre que telle action, telle rature ou tel amendement, serait pour mieux servir !
Servir qui ?
Sinon soi-même.
Tout ce tolalito n’aurait-il qu’une seule finalité ? Trouver un prétexte pour s’attribuer plus de pouvoir ? Dans l’indifférence aux problèmes de la population.
jeudi 21 août 2008
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