Juge Anel Alexis Joseph, Président de la Cour de cassation
Photo: Francis Concite, Le Nouvelliste, 5 octobre 2011
D'une liste de 18 candidats soumise par le Sénat à la Présidence de la République (1), deux juges, Me Anel Alexis Joseph, Président de la Cour d'Appel de Port-au-Prince, et, Me Jean-Louis J. Mécène, juge à la Cour d'Appel des Gonaïves, ont été choisis par la Présidence, le mercredi 5 octobre 2011, pour siéger à la Cour de Cassation, le premier, désigné par la Présidence comme étant le nouveau Président de cette Cour.
Le nom du juge Anel Alexis Joseph figure au treizième rang dans la liste des dix-huit noms soumise par le Sénat. Six d'entre eux devraient être choisis pour combler les postes vacants à la Cour de Cassation.
Le juge Anel Joseph est, sans aucun doute dans mon esprit, un bon choix fait par le Président Michel Martelly. J'ai entendu à la radio hier les brèves remarques de Me Gervais Charles qui n'approuverait pas ce choix ou la manière dont ce choix aurait été fait. Je respecte la position de cet éminent homme de loi que j'aime entendre à chaque fois qu'il intervient sur les ondes de CKUT (Montréal, émission de Raymond Laurent le samedi).
Si j'étais Président de la République en 2011, j'aurais choisi Me Anel Joseph de la liste soumise par le Sénat pour faire de lui le nouveau Président de la Cour de Cassation.
Ce que je sais du juge Anel Joseph.-
Au début des années 1970, j'étais un jeune universitaire. Pour gagner honnêtement un petit peu d'argent et pour aider un ami d'enfance qui vivait très modestement sur la colline en arrière de l'Église Saint-Antoine à Port-au-Prince, j'avais loué d'un certain individu un petit local pour loger une petite entreprise que gérait avec moi mon bon ami.
Tout avait bien démarré. Mais brusquement, un litige survint entre l'individu, mon bon ami et moi.
La cause fut entendue par le jeune juge Anel Joseph qui siégait à l'époque au Tribunal de Paix de la section de Port-au-Prince où était situé le petit local en question. Le tribunal de Paix était situé à quelques pas de la Cathédrale de Port-au-Prince. C'était une affaire de toute petite créance et il n'était pas opportun d'engager un avocat pour me représenter devant le juge Anel Joseph.
L'individu en question avait des connexions dans les hautes sphères du pouvoir de l'époque et l'un des frères de cet individu était membre des Forces Armées d'Haïti. C'était d'ailleurs le frère de l'individu qui avait pris les moyens pour que cet individu ne respectât pas le contrat qui nous liait à lui.
Notre cause était juste. Le juge Anel Joseph, ayant entendu les deux parties en cause, était en train de prendre les mesures qu'il fallait pour que l'individu réparât les torts que son frère et lui nous avaient causés. Mais l'individu, faisant jouer ses atouts politiques et militaires, cherchait à se dérober: la force avait, un moment, réussi à primer le droit.
J'étais alors allé rencontrer le juge Anel Joseph au tribunal pour voir avec lui comment arriver à faire respecter mes droits dans cette affaire. Comme je n'avais pas les moyens pour engager les services d'un avocat et comme je ne pouvais pas contrecarrer les puissants atouts dont disposait l'individu en cause, le juge Anel Joseph, dans sa sagesse, m'avait alors suggéré d'écrire au commandant de la branche des FADH de qui relevait le frère militaire de l'individu pour lui exposer les faits et demander réparation des torts causés.
J'ai immédiatement écrit au Colonel des FADH qui était le boss du frère de l'individu. Ce colonel était un homme de bien, un bon père de famille; il habitait une maison située sur une rue qui constituait le prologement de l'avenue Poupelard, un peu avant son intersection avec la ruelle Nazon. J'étais presque certain qu'il allait décider en ma faveur. Dès qu'il a été mis au courant du litige, le Colonel a pris les moyens pour que son subalterne réparât à ma pleine satisfaction les torts que son frère et lui m'avaient causés.
Cette affaire m'avait donné l'occasion de cotoyer le juge Anel Joseph, de voir un peu comment devrait fonctionner l'appareil judiciaire, comment devraient interagir le Pouvoir judiciaire, le Pouvoir exécutif, le Parquet. Les réflexions du juge Anel Joseph qui parlait seul à seul avec moi en dehors du tribunal en une ou deux occasions durant le litige en question, m'ont permis de découvrir la grande sagesse, la grande lucidité, la droiture qui animaient ce jeune homme de loi.
Ayant quitté le pays depuis quelques dizaines d'années, je n'ai pas pu suivre à la trace le parcours de Me Anel Joseph au sein du Pouvoir judiciaire, mais j'étais convaincu qu'il allait faire son chemin dans cette haute institution.
Je dois ajouter que j'ai eu à faire affaire avec Me Anel Joseph vers 1974-1975 au moment où la Faculté des sciences humaines fut créée par Monsieur Pierre-Pouis Salomon. Il était, à ce moment-là, le Secrétaire général de cette nouvelle faculté. Quelques ingénieurs camarades de promotion et moi, Lionel Duvalsaint, Nicolas Janvier, etc., fraîchement diplômés de la Faculté des Sciences et travaillant pour le Ministère des Travaux Publics, nous allions, après le travail, de 4h PM à 8h PM suivre des cours de sciences humaines. Je crois que c'est là, dans ces cours de sciences humaines, que j'ai cotoyé un moment l'ingénieur Fritz Longchamps qui, lui, venait de l'ISTH (école d'ingénieurs de Richard Leconte).
Je n'ai pas beaucoup de mémoire, encore moins la mémoire des noms. Mais le nom du juge Anel Joseph est resté à jamais gravé dans ma mémoire; son visage aussi.
Félicitations, juge Anel Joseph.
Et bon travail à la présidence de la Cour de Cassation.
Dr. Pierre Montès
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(1) Le lien suivant conduit vers une page du site Web du Parlement haïtien qui présente la liste des candidats retenus par le Sénat: 18 personnalités retenues par le Sénat pour les 6 sièges à la Cour de Cassation.
Lire aussi l'article de Claude Gilles: Un président à la tête de la Cour de Cassation, Le Nouvelliste du 5 octobre 2011.
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