Vous trouverez ci-dessous un article que Madame Elisabeth Deetjen a eu la gentillesse de me signaler. Il provient du lien ci-après:
//Source: Alterpresse
http://www.medialternatif.org/alterpresse/spip.php?article6614
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Bonne lecture.
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Haiti : La dégradation de l’environnement, symptôme d’un mal développement
Alterpresse, mardi 13 novembre 2007
Par Raoul Vital
Groupe d’Intervention et de Recherche Sociale (GIRES)
L’environnement d’Haïti subit les conséquences de modèles de développement incommodes. A cause de leur pénétration brutale, ces recettes de développement à l’occidentale, ont eu des implications socioculturelles importantes. Il en résulte le déboisement du pays, la dégradation de l’économie paysanne, l’exode rurale et la construction de bidonvilles dans les périphéries des principales villes du pays.
L’environnement d’Haïti subit les conséquences de modèles de développement incommodes. A cause de leur pénétration brutale, ces recettes de développement à l’occidentale, ont eu des implications socioculturelles importantes. Il en résulte le déboisement du pays, la dégradation de l’économie paysanne, l’exode rurale et la construction de bidonvilles dans les périphéries des principales villes du pays.
Ce ne sont pas les couches les plus marginalisées auxquelles les gouvernements font l’aumône après chaque catastrophe naturelle qui sont responsables de cette désorganisation/réorganisation du tissu économique et social du pays. Les discours qui tendent à culpabiliser les paysans et les habitants – les anciens paysans - des bidonvilles sont de même nature que les mythes du développement qui détruisent les pays dits du Tiers Monde, tels s’ils sont pauvres c’est leur faute, s’ils veulent se développer ils doivent s’industrialiser, s’ils veulent créer des emplois ils doivent s’ouvrir à l’investissement de capitaux étrangers. Voyons de plus près les conséquences de ces mythes sur l’environnement du pays.
Le développement tel qu’il a été conçu à l’Ouest est d’abord un processus d’industrialisation dans la mesure où il vise la transformation des économies locales de faible productivité en des économies industrielles. Ces économies industrielles exigent l’investissement de capitaux. Or, en Haïti les élites économiques ne disposent pas de capitaux nécessaires pour propulser le pays vers cette phase de développement. Pour cette raison les acteurs économiques sont donc obligés de se tourner vers les capitaux étrangers avec comme corollaire un autre type de colonialisme après la période de décolonisation : colonialisme économique.
Ce nouveau visage du colonialisme a abandonné sa mission qui est de civiliser les pays attardés pour adopter une nouvelle : développer le Tiers Monde. Les Nations-Unies, suite à une proposition du président américain John Kennedy, l’ont clairement exprimée dans leur plan de développement pour le Tiers Monde appelé « Décennie de développement ». Cette idée de développement économique lancée en 1961 suppose à cette époque la croissance économique dont la mesure est le Produit National Brut (PNB) et la transformation des sociétés traditionnelles en sociétés industrielles modernes, c’est-à-dire le passage d’une économie rurale à une économie urbaine.
Cette phase de développement impliquait le bouleversement du milieu ambiant. Alors, comment obtenir la croissance économique tout en préservant l’environnement ? C’est ici que se pose donc tout le problème de développement durable.
Les politiques de développement adoptées dans les années 60 ont été marquées par des approches modernistes et keynésiennes selon lesquelles il faut s’appuyer sur des filières porteuses, telles le financement des institutions internationales, l’exportation des techniques pour stimuler des pôles de croissance. Ces stratégies ont échoué dans les pays dits Tiers Monde en créant l’inflation et l’endettement. En 1970, la dette extérieure nette d’Haïti était de 40 millions de dollars. Huit ans après, soit en 1978, elle s’élevait à 163 millions de dollars.
La pénétration des capitaux étrangers a eu également de graves conséquences sur les exportations. Haïti exportait biens et services, en 1960, à hauteur de 54,4 millions de dollars. En 1968 ce chiffre est révisé à la baisse soit 47 millions de dollars. L’exportation du café qui constituait le pilier de l’économie paysanne est en régression à la suite de l’adoption du modèle de développement fabriqué à l’Ouest.
En 1963, Haïti exportait 26387 tonnes de café alors qu’en 1968 elle n’exportait que 19498 tonnes. Les paysans qui vivaient du café, à cause de la dévalorisation de leur produit, sont obligés de chercher d’autres sources de revenus. Certains sont donc dirigés vers des centres urbains où on leur avait promis de l’emploi.
Entre autres conséquences, la population urbaine est passée entre 1950 et 1971 de 12% à 20% de la population totale. Cette situation a provoqué la pression démographique sur les zones urbaines. La dégradation de l’environnement s’est également accélérée durant cette période.
En 1979, on estimait que, seulement à Jean Rabel (Nord-ouest), 250 sacs de charbon équivalents à un millier d’arbres, partaient quotidiennement vers Port-au-Prince. Selon Luc Pierre-Jean, entre 1950 et 1986, la superficie forestière d’Haïti est passée de 18% à 3% (Revue Conjonction, mai 1989). Si rien n’est fait pour arrêter la déchéance, le pays doit s’attendre au pire. Comment arrêter donc la dégradation et concilier les politiques de développement à la protection de l’environnement ?
Le Consensus de Washington, paru vers le milieu des années 80, pour corriger les effets désastreux de la décennie de développement n’a pas apporté les résultats espérés par le Tiers Monde. Cette nouvelle stratégie de développement axée sur l’adoption de programmes d’ajustement structurel ne fait qu’accélérer la dégradation socioculturelle et environnementale du pays. On assiste donc aujourd’hui à l’effondrement des mythes de développement dans la mesure où les pays du sud n’arrivent pas à calquer les modèles occidentaux. Certains parlent de la fin du développement.
Vers la fin des années 90 est apparu un nouveau paradigme qui tient compte de l’implication des différents acteurs du développement, tels la société civile, l’État et les investisseurs. La concertation entre ces acteurs est appelée à corriger les effets négatifs du développement : concentration urbaine, inégalités sociales, destruction de l’économie paysanne, déboisement.
Pour se donner bonne conscience face à la dilapidation des ressources des pays sud pauvres, les maitres du monde ont adopté des mesures de toute sorte : Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ; et chez nous Document de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP).
Contrairement aux analyses superficielles des causes de dégradation de l’environnement, les urgences de l’heure nous obligent à tenir compte des causes structurelles. Les analyses des causes structurelles peuvent amener à la conclusion que les politiques de développement sont des sources d’instabilité.
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