vendredi 4 avril 2008

Qui assurera la gestion des fonds du DSNCRP?

NDCDP.- Le document auquel réfère l'article de M. Pharel est disponible en format pdf sur le site Web du Ministère de l'Économie et des Finances et sur celui du Ministère de la Planification et de la Coopération Externe. Vous trouverez deux liens vers ces sites Web dans la colonne de droite de ce blog. Le titre exact du document est: "Document de Stratégie Nationale pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté" (DSNCRP); il contient 172 pages et la taille du fichier est de 2,54 Mo.

***

Par Kesner Pharel
kesnerpharel@lematinhaiti.com

Tenaillés par la faim dans une conjoncture économique extrêmement difficile (voir l’éditorial de Roody Edmé), un grand nombre d’Haïtiens seront submerges par des nouvelles dans les média durant tout le mois d’avril de promesses d’assistance financière des bailleurs de fonds pour sortir la population de la situation de pauvreté pour certains (7,1 millions) et d’extrême pauvreté pour d’autres (4,4 millions). La population haïtienne est en fait habituée à ces effets d’annonce de promesses de fonds substantiels de la part de la communauté internationale. On se rappelle encore de la joie débordante de l’ancien Premier ministre, Gérard Latortue, durant l’été 2004 au siège de la Banque mondiale dans la capitale fédérale américaine, après les promesses de plus de 1 milliard de dollars américains faites par les bailleurs aux autorités haïtiennes pour l’implémentation du Cadre de coopération intérimaire (CCI). Beaucoup d’eaux ont coulé sur les ponts depuis lors et la grande majorité de la population, si on devait la consulter aujourd’hui, répondrait qu’elle n’a pas ressenti une cerataine amélioration de ses conditions de vie.

Le CCI est mort avec le gouvernement de transition et le DSNCRP représente de nos jours la nouvelle bible du développement prônée par l’administration Alexis. A la manière d’un homme d’affaires recherchant des capitaux auprès d’investisseurs privés pour financer un important projet, le Premier ministre haïtien, Jacques Edouard Alexis, a déjà pris son bâton de pèlerin pour visiter les grandes villes du Nord en quête de financement pour son ambitieux projet dénommé Stratégie nationale pour la croissance et la pauvreté (DSNCRP). Il revient récemment de Washington, D.C où il a rencontré des bailleurs multilatéraux (BID et Banque mondiale) et des responsables de l’administration Bush et s’apprête déjà à s’embarquer pour Miami où se tiendra ce week-end l’Assemblée annuelle de la Banque interaméricaine de développement (BID). Une excellente occasion pour rencontrer dans un même endroit les grands argentiers de plusieurs pays amis d’Haïti et essayer de les convaincre à apporter leur soutien au programme du gouvernement pour les prochaines années. Le patron du gouvernement haïtien sollicite des bailleurs internationaux l’importante somme de 3,9 milliards de dollars américains, soit plus de 150 milliards de gourdes. Ce montant devrait être dépensé au cours des trente prochains mois.

A part les lettres qui sont différentes et le deuxième sigle qui est beaucoup plus long, les observateurs de la situation économique haïtienne peuvent bien demander ce qui distingue vraiment le CCI du DSNCRP. Les membres du gouvernement répondraient rapidement que le second est un produit purement local, fruit d’une consultation nationale, tandis que le CCI, selon ses principales critiques, est un produit fabriqué et impose par des experts de la communauté internationale. Je pense réellement que dans le fond les deux programmes, à travers les objectifs de croissance et de réduction de la pauvreté fixés, ne sont pas trop différents. Là où se situe vraiment la différence, c’est au niveau des institutions qui auront à dépenser les fonds. A rappeler que les fonds alloués dans le cadre du CCI ont été décaissés à travers le circuit des Organisations non gouvernementales (ONG), en raison du manque de confiance a l’époque dans la gouvernance de l’administration publique haïtienne.

Les visites à l’extérieur du chef du gouvernement ne consistent pas seulement à convaincre les bailleurs à mettre les fonds à la disposition du pays, mais aussi qu’ils soient décaissés à travers le circuit gouvernemental. Les responsables économiques et financiers veulent bien avoir le contrôle de ces capitaux qui seront utilisés dans la partie Investissements du budget de la République. «Une bonne partie de cette aide est injectée dans des programmes que gèrent des ONG, certains de ces programmes ne marchent pas, nous allons orienter ces fonds dans notre stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté», a affirmé M. Alexis durant sa visite à Washington, D.C. Une telle déclaration exprime clairement sa volonté d’assurer le contrôle des fonds des bailleurs qui étaient jusqu’à présent en grande partie sous la supervision des ONG. On ignore pour le moment si les responsables de ces dernières vont s’avouer facilement vaincus, car bon nombre d’entre elles pourraient « crier faillite » dans un tel cas.

Dans le but de convaincre les bailleurs à confier au gouvernement la gestion des fonds qui seront alloués pour l’implémentation de la Stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté, les responsables du gouvernement ont expliqué comment ils comptent gérer le projet. Le document révèle qu’une structure comprenant deux niveaux est mis en place. Le premier, stratégique, sous le patronage du Président de la République et l’arbitrage du Premier ministre, l’autre, opérationnel, animé par le Ministère de la planification et de la coopération externe et le Ministère de l’économie et des finances. Ces niveaux intègrent les partenaires principaux les partenaires principaux du développement, à savoir, le secteur privé, les collectivités territoriales, et le secteur de la coopération, incluant les agences internationales et les ONG.

Il faut reconnaître que le plan mis sur papier présente une fière allure, respectant les normes de management public moderne. Mais il faudrait que les joueurs sur le terrain, les membres de l’administration publique, puissent démontrer leur capacité à délivrer la marchandise. D’où l’éternelle question de capacités d’absorption.
vendredi 4 avril 2008

//L'article ci-dessus provient du lien ci-dessous:
http://www.lematinhaiti.com/PageArticle.asp?ArticleID=12079
//

Aucun commentaire: